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Géographie
La tectonique des plaques, théorie d’avant-garde
Tout commence aux pôles
A Taylor soupçonnait qu'il avait existé, autrefois, un continent unique centré
sur le pôle Nord, qui s'était ensuite morcelé. En s'éloignant du pôle, ses
fragments se seraient dispersés sous l'effet de la force centrifuge résultant de
la rotation de la Terre, et leurs bordures, en se déformant, auraient donné
naissance aux chaînes montagneuses plissées — Alpes, Rocheuses et Himalaya.
V On croyait, autrefois, que les mouvements de la Terre résultaient d'une
intervention divine. C'est ce qu'illustre cette toile, intitulée « le Déluge »,
que l'on doit à Francis Darby (1793-1861).
La dérive des continents devient une science
La première version réellement scientifique de la dérive des continents a été
proposée par Frank Bursley Taylor, un géologue américain, au cours d'une
conférence en 1908 et dans un article publié en 1910. Taylor pensait qu'il
existait à l'origine deux grandes masses continentales situées l'une au pôle
Nord et l'autre au pôle Sud, qui avaient commencé à migrer en direction de
I'équateur au cours de /'ère tertiaire. Lors de ces déplacements, ces masses
continentales se seraient morcelées, leurs limites déformées donnant naissance
aux chaînes de montagnes tertiaires, telles que les Alpes et l'Himalaya.
La communauté scientifique de l'époque ignora en grande partie les travaux de
Taylor. Peu de géologues étaient prêts à accepter une idée qui contrariait des
théories en vigueur depuis l'avènement de la géologie scientifique, à la fin du
XVIIIe s. Il manquait ensuite aux arguments de Taylor des références aux
disciplines traditionnelles telles que la paléontologie et la stratigraphie. De
plus, Taylor n'appartenait pas à la communauté géologique, et n'était titulaire
d'aucun poste universitaire ou dans un organisme de recherche. C'était un
solitaire, et ses travaux étaient financés par la fortune de son père. De santé
précaire, il se faisait continuellement accompagner sur le terrain par un
médecin et plus tard par sa femme. Les autres géologues ¡'ignoraient et le
considéraient comme un excentrique.
Finalement, le peu d'attention dont Taylor aurait pu bénéficier se reporta
bientôt sur Alfred Wegener, météorologiste et astronome allemand.
Wegener, l'intrus
Alfred Wegener (1880-1930), fils d'un pasteur de Berlin, avait obtenu le diplôme
le plus élevé en astronomie, puis un poste en météorologie à l'université. Il
passa ensuite la plus grande partie de sa vie à enseigner et à étudier cette
dernière discipline. Tué lors d'une expédition au Groenland, il ne vécut pas
suffisamment pour voir ses hypothèses vérifiées. Wegener n'était pas géologue,
et, de ce fait, la communauté géologique regardait avec un certain agacement cet
intrus qui « braconnait » littéralement sur ses terres. Aux États-Unis, Wegener
fut même traité de charlatan par ceux qui préféraient ignorer qu'il était dans
une autre discipline, un scientifique sérieux.
A peine cent ans après le
voyage de Christophe Colomb, Francis Bacon avait remarqué que l'Afrique et
¡'Amérique du Sud semblaient
s'emboîter.
La naissance de la théorie du « supercontinent »
Les géologues considèrent Wegener comme le vrai père conceptuel de la dérive
des continents, non parce qu'il fut le premier à y penser, mais parce qu'il
fut le premier à en faire un exposé scientifique détaillé. Après un premier
article publié en 1912, son livre, Die Enstehung der Kontinent und Ozeane
(L'Origine des continents et des océans), parut en 1915. Hélas, cette
première édition resta longtemps inconnue hors d'Allemagne, car la Première
Guerre mondiale en empêcha la traduction. La deuxième édition, en 1920,
subit le même sort, bien qu'elle eût suscité de l'intérêt en Europe. La
troisième édition (1922), enfin, fut éditée en anglais, français, espagnol,
suédois et russe en 1924, et provoqua immédiatement une controverse, plus
particulièrement en Grande-Bretagne et en Amérique.
La principale conclusion de Wegener était qu'il existait originellement un
supercontinent qu'il appelait « pangea » (littéralement : « toute-la-Terre »
ou « toutes-les-terres ») et qui, par la suite, continua d'être désigné sous
le nom de Rangée. Au cours de /'ère mésozoïque, la Rangée se serait
morcelée, et ses fragments — les continents actuels — auraient dérivé vers
les positions que nous leur connaissons. Pour étayer son exposé, Wegener
présenta des preuves dans différentes disciplines : géologie, géophysique,
paléontologie, biologie, paléoclimatologie.
Un accueil peu enthousiaste
Malgré certaines réserves sur les arguments de l'exposé, de nombreux
géologues, plus spécialement en Grande-Bretagne, accueillirent d'abord
favorablement les idées de Wegener. Aux États-Unis, par contre, sa théorie
fut accueillie avec scepticisme et hostilité. A chaque argument de Wegener,
en effet, pouvaient être opposées d'autres interprétations n'impliquant pas
d'hypothèse mobi/iste.
Le mécanisme de la dérive des continents n 'était pas clair. Wegener
suggérait que les forces responsables des mouvements des continents
résultaient de la rotation de la Terre ; mais cette proposition n'était pas
convaincante. Vers la fin des années 20, pourtant, un certain nombre de
géologues, et notamment l'Anglais Arthur Holmes, étaient arrivés à la
conclusion que la partie supérieure du manteau terrestre, quoique solide,
n'était pas forcément immobile : peut-être se déplaçait-elle lentement, au
cours de longues périodes, permettant ainsi le déplacement latéral de la
croûte continentale sus-jacente. De plus, si le manteau supérieur contenait
une source d'énergie, comme la chaleur, il était possible d'envisager le
déplacement des continents sous l'effet de courants de convection.
Mais la dérive des continents restait difficile à concevoir. En effet, en
admettant la puissance des forces intratelluriques exercées sur les
continents, comment ceux-ci avaient-ils pu se forcer un chemin à travers une
croûte océanique solide ? En 1929, Arthur Holmes suggéra que les montagnes
résultaient de l'affrontement mécanique des croûtes océanique et
continentale. Il soutenait également que les températures et les pressions
élevées qui s'exercaient ainsi sur les roches augmentaient leur densité, et
que cei-les-ci s'enfoncaient dans le manteau. De cette
manière, les continents pouvaient progresser en dérivant à partir de la
Rangée initiale.
Convaincant ou non, l'article de Holmes (1929), fut publié dans une revue
peu connue. Il en fut de même du livre Our Wandering Continents (1937), du
géologue sud-africain Alexan-der du Toit dans lequel H apportait de
nouvelles données et complétait les hypothèses de Wegener, ce qui donnait à
l'ouvrage une portée remarquable, bien que tardivement reconnue.
Après l'émoi initial provoqué par Wegener en 1920, la dérive des continents
ne suscita plus beaucoup d'intérêt jusqu'à la fin des années 50. A ce
moment-là, de nouvelles données commencèrent à affluer d'un domaine de
recherche inattendu. Vers 1970, une véritable révolution commençait dans les
sciences de la Terre.
Les cartes de Wegener (1912)
coïncident très bien avec les cartes paléogéographiques actuelles. La carte
du haut représente le globe au Carbonifère supérieur (ou Pennsylvanien) et
montre qu'il n'existait à cette époque qu'un seul continent : la Pangée. Au
centre, une représentation à l'Éocène après le début du morcellement de la
Pangée. La carte du bas est une image de la Terre à la fin du Quaternaire
(pratiquement l'époque actuelle). Les mers épicontinentales peu profondes
ont été figurées par des hachures.
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Dernière modification le : 18/09/2013 à 15:46.
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